photo: Pierre Dury
DAVID ALTMEJD
22-08-15
On en a de la chance à Montréal. Cet été, les deux grands musées de la ville nous donnent rendez-vous avec deux sculpteurs marquants : Auguste Rodin au Musée des beaux-arts et David Altmejd au Musée d’art contemporain. Le premier a révolutionné la sculpture il y a un peu plus de 100 ans et le second fait la même chose aujourd’hui.
Parce que c’est un nom établi, on ira plus volontiers vers Rodin mais ce serait une grave erreur de passer à côté de David Altmejd. La rétrospective que le MAC lui consacre compte une trentaine d’œuvres qui surprennent, bousculent, inquiètent, intriguent, mystifient, amusent et qui, au final, confirment l’immense talent de ce natif de Montréal.
Réglons la biographie de David Altmjed avant d’aborder l’exposition stupéfiante qu’il nous propose. Il est né à Montréal d’une mère québécoise et d’un père juif polonais immigré ici dans les années 60. Après avoir tâté la biologie, il se destine aux arts visuels et c’est à l’UQÀM qu’il opte pour le medium sculpture. Aujourd’hui, à 41 ans, sa notoriété est internationale. Même s’il vit à New-York où se trouve son atelier, tout le monde sait que ce génie créatif est Québécois.
Altmejd a choisi la sculpture parce que c’est la discipline qui permet un résultat se rapprochant le plus de l’être humain. C’est fascinant de l’entendre raconter comment, à chaque fois, il s’applique à créer un objet en trois dimensions qui sera fini de l’extérieur mais qui contiendra un espace infini à l’intérieur.
Évidemment, pas question pour lui de faire une représentation classique des sujets qu’il traite. Le buste de sa sœur en est un bon exemple. Au lieu d’un visage encadré par une chevelure, il propose un trou noir fait de cristaux. Assez violent comme image mais son but c’est de nous faire réaliser que chaque être humain est complexe et profond.
Dans d’autres œuvres, il donne à l’objet la responsabilité de sa propre forme. On voit un corps qui se construit par l’action d’une main sur la matière. Des mottes de plâtre arraché au mur semblent avoir contribué à façonner ce qu’il appelle ses bodybuilders.
Il faut savoir qu’Altmejd travaille de façon organique. Pas de croquis, il fabrique sa sculpture au gré de son imagination, comme une improvisation. Ce qui amène l’artiste dans une sorte de délire pictural fait de fils, de cristaux, de paillettes, d’éclats de miroirs, de fluides, de fruits, de fuite. L’objet qu’il veut mettre en scène est important mais la structure de présentation l’est tout autant.
J’ai un faible pour Le Spectre et la main, une sculpture qui met en scène des zèbres dans une course effrénée soulevant un nuage arc-en-ciel.
Les boîtes de plexiglass qui contiennent les scènes qu’il crée rappellent les cabinets de curiosités d’autrefois qu’on aurait mis dans la maison des miroirs. Inutile de dire que dans ce contexte les repères du visiteur sont complètement bouleversés. En passant, chapeau pour le travail de mise en scène et bravo aux techniciens qui ont monté cette exposition.
David Altmejd le dit souvent, il ne faut pas nécessairement chercher à comprendre ce qu’il propose. Mais j’avoue que l’audioguide qu’on peut télécharger sur notre téléphone intelligent rend cette visite encore plus passionnante. Altmejd y raconte son travail d’une façon simple, empathique et accessible. Bref il ne faut surtout pas avoir peur de cet univers.
Il vous reste jusqu’au 13 septembre pour découvrir David Altmedj et l'exposition Flux. C’est un investissement car on n’a pas fini d’entendre parler de lui.