photo: Pierre Dury
DEUX FILMS À VOIR:
LA PASSION D'AUGUSTINE ET LE NEZ
31-03-15
Le film est bien meilleur que sa bande annonce. Le rythme est beaucoup plus lent et laisse place à l'émotion
Avec près de 700 mille dollars de recettes aux guichets depuis sa sortie le 20 mars dernier, vous n’avez pas vraiment besoin de moi pour vous convaincre d’aller voir La Passion d’Augustine de Léa Pool. Le bouche à oreille est excellent.
Mais même en retard, je me permets d’ajouter mon grain de sel car j’ai juste envie de partager le plaisir que j’ai eu à voir ce film il y a deux semaines. Et, permettez-moi d’être personnel, ça a été un plaisir familial.
J’y suis allé avec ma conjointe qui a renoué avec des pans de sa jeunesse du temps qu’elle étudiait chez les Sœurs Grises. Elle a trouvé que La Passion d’Augustine reconstituait parfaitement l’atmosphère de l’époque. De son avis, c’est particulièrement probant dans la variété des personnages de religieuses qu’on nous donne à voir. Le casting rappelle avec justesse que le voile n'arrivait pas à gommer les différentes personnalités des soeurs. Il y avait la rigide, la comique, la corpulente, la vieille, la novice, l’autoritaire et, bien sûr, la bonne sœur.
Diane Lavallée, Pierrette Robitaille, Valérie Blais, Andrée Lachapelle, Anne-Elisabeth Bossé, Marie Tifo et Céline Bonnier sont tout cela avec brio.
Mon fils et sa blonde nous accompagnaient au cinéma. Ils sont, tous les deux, au début de la vingtaine. Aussi bien dire qu’ils ne connaissent rien de ces années 60 lointaines. Et pourtant, ils avaient très hâte d’assister au film. Enfin, ils pourraient voir sur grand écran leur amie Lysandre Ménard.
Cette Lysandre incarne, à mon avis, le personnage principal du film, Alice, une enfant rebelle douée au piano. Cette jeune fille préfigure la fin de ce système un peu archaïque que sont devenus les couvents avec l’arrivée de la Révolution tranquille.
Dans la vraie vie, Lysandre Ménard est aussi une jeune fille, assez exubérante, qui fait partie du groupe The Loodies. Mais au cinéma, elle fait preuve d’une grande maturité. Son talent de pianiste (elle est une élève d’André Laplante au Conservatoire) explose à l’écran car Léa Pool donne du temps à la musique, comme si c’était un personnage en soi. Ai-je besoin de dire que toute ma famille a été sous le charme de Lysandre? C’est la révélation de ce film.
Et moi, ce qui m’a parlé, tiré des larmes même, c’est le triste spectacle d’une institution contrainte à s’effacer devant la modernité. Il y a une scène troublante à cet égard. Pendant de longues minutes, de magnifiques images nous montrent les sœurs renoncer à leur voile pour enfiler un nouvel uniforme qui, éventuellement, annoncera la disparition de leur ordre. Il y a une actualité dans cette reconstitution car notre époque jette aussi des traditions au nom du progrès. Et c’est souvent difficile à accepter.
La suissesse d’origine Léa Pool pose sur cette période de l’histoire du Québec un regard empreint d’une neutralité bienveillante qui donne toute sa richesse à ce film. Vraiment…à voir.
Après Rebelle, film sur les enfants-soldats qui l’a mené aux Oscars, le réalisateur Kim Nguyen nous convie à un documentaire sur l’odorat, Le Nez.
Son film rassemble des personnages de partout dans le monde qui ont différents rapports aux odeurs. Une jeune femme qui ne sent plus rien à cause d’un accident (quand l’odorat lui reviendra, elle commencera par sentir son cerveau!!!!).
Un cueilleur de truffes qui compare les effluves du précieux champignon au Viagra. Un parfumeur qui commercialise l’odeur de vulve en flacon. Un chasseur d’ambre gris (du vomi de cachalot solide) qui entre dans la composition des parfums de luxe. Un cultivateur de safran (vous comprendrez pourquoi ça coûte si cher).
Avec des spécialistes, Kim Nguyen aborde aussi le pouvoir de l’odorat sur la mémoire. On verra une dame âgée privée de la parole, replonger avec émotion dans son passé en inhalant le parfum d’une fleur. Pour sa part, le sommelier québécois François Chartier raconte comment un vin blanc aux effluves de cannelle peut le ramener à son enfance et à des souvenirs de hockey sur glace.
Le film Le Nez nous offre aussi l’expérience d’entendre une odeur car, démonstration à l’appui, les effluves émettent des ondes. La truffe a sa musique, idem pour le safran. Comme dirait Charles Tisseyre : ‘’fascinant’’.
Kim Nguyen n’a pas la rigueur d’un documentariste chevronné alors son film s’éparpille un peu. Mais son sujet est tellement riche et surprenant (inspiré du livre Papilles et Molécules de François Chartier) qu’il mérite le déplacement.
D'ailleurs on aurait bien aimé que Le Nez soit projeté en odorama!